Chers amis,

L’Europe est à bout de souffle et son époque est détraquée, pour parler avec Shakespeare. Ce qui démontre une fois encore que l’histoire se répète et que nous n’en tirons aucun enseignement. Qu’hier ne diffère en rien d’aujourd’hui.

L’été indien peut commencer. Et s’il est trop humide, ou trop chaud, on se réfugiera dans un théâtre. Je l’avoue: je suis accro au théâtre. Cela reste la forme d’expression la plus exaltante et la plus libre du monde des arts. Pendant le mois d’août, nous avons eu l’occasion de travailler au magnifique théâtre Bourla à Anvers. Plus de trois semaines sur la grande scène. Quel luxe. Quel défi. D’ailleurs, Guy Cassiers et son équipe méritent le grand prix de l’engagement et de l’hospitalité. C’est un endroit particulier, le Toneelhuis. Nous sommes en train de travailler sur une interprétation du livre de Stefan Hertmans, ‘Guerre et Térébenthine’, sous le mot d’ordre: un livre est un livre, et une pièce de théâtre est une pièce de théâtre. Même pendant ce processus de travail, je me retrouve confronté à mon attitude agnostique en matière d’art. Remplacer Dieu par l’art, ce sera toujours une idée pauvre. Mais il faut faire avec. L’ardeur avec laquelle Hertmans décrit dans ses deux derniers romans, sublimes au demeurant, les tortures et les atrocités est la preuve de l’impuissance du sérieux de l’art. Comment évoquer la guerre sans tomber dans le divertissement? Qu’est-ce que l’imagination si Dieu est mort? Comment jouer un héros dont le trou de balle est en feu? Je m’entends dire aux performers: tapez-vous sur la gueule pendant soixante minutes. Brillant, comme indication de mise en scène. Il y a assez de glaçons dans le congélateur? Le problème du divertissement est aigu. En ce sens, le spectacle de Milo Rau sur Dutroux avec des enfants, que j’ai vu au TheaterFestival, est répugnant. L’utilisation de musique sentimentale et d’humour, par manque d’assurance, oblige l’agnostique en moi à se lever pour une ovation tragique. On continue à se marrer comme des petits fous.

A part ça, nous sommes aussi curateur du grand Malta Festival de Poznań 2018 en Pologne. Le ministre de la culture du gouvernement actuel, très droitier, n’est pas très chaud à l’idée qu’un artiste étranger se mêle de leur festival. Le choix de la très courageuse équipe du festival, sous la direction de Michał Merczyński et Kasia Tórz, a entraîné par conséquent une coupe claire de 70 pour cent du budget. Notre mission consistait à inviter une dizaine de productions théâtrales du monde entier, et de concevoir une programmation cinéma et une exposition sous le titre: Leap of Faith, librement traduit: un saut dans l’inconnu. La définition de l’art, en quelque sorte. Mais ce n’est pas cela que veulent les nouveaux dirigeants vulgaires de par le monde. L’ancien curateur, l’artiste croate Oliver Frljić, a dû fuir la Pologne pendant le festival suite à des menaces de mort, bagarres, manifestations d’extrême-droite, et j’en passe. Tout cela parce qu’il avait créé un spectacle critique sur la foi catholique. C’est un mensonge de dire que dans notre société néolibérale, les politiciens sont sans pouvoir. Il faut dire qu’on vote pour eux un peu à la légère. Il suffit d’un seul homme et d’une petite équipe pour qu’un pays change de visage de manière effroyable. La liste des dirigeants vulgaires démocratiquement élus devient trop longue à mon goût. Le monologue final de la sublime Lobke Leirens dans la merveilleuse pièce ‘Another one’, également vue au TheaterFestival, dans laquelle elle demande au public de faire un pas en arrière, puis à gauche, puis encore à gauche, une nouvelle fois à gauche, et en arrière et encore à gauche, est par conséquent une directive pour tous ceux qui ont perdu leurs dieux et qui s’en accommodent très bien.

JL

Guerre et Térébenthine, l’adaptation par Jan Lauwers du livre unanimement salué par la critique de Stefan Hertmans sur la Grande Guerre, avec Viviane De Muynck dans le rôle principal, connaîtra sa première du 7 au 17 décembre 2017 au Toneelhuis.

1095 de Kuiperskaai — la jeune troupe de théâtre qui a trouvé refuge au MILL — connaîtra sa première au festival pour (jeunes) créateurs Love at First Sight. Leur regard anticonformiste sur le Moyen Âge est à voir au Monty Kultuurfaktorij les 13, 14 et 15 septembre 2017. Ensuite, leur tournée passera par la Belgique et les Pays-Bas: Theater Aan het Spui (La Haye), De Grote Post (Ostende), Theater Aan het Vrijthof (Maastricht), 30CC (Louvain), CC Belgica (Termonde), NTGent et Theaterfestival Boulevard ('s-Hertogenbosch).

En 2018, Maarten Seghers sortira une nouvelle performance, Concert by a Band Facing the Wrong Way. Ce sera un mélange rythmé de musique et de théâtre, en collaboration avec le batteur suisse Nicolas Field et le guitariste néerlandais Rombout Willems. Maarten poursuit dans ce spectacle sa recherche sur la limite entre le divertissement et la tragédie. Coproduction L’Auditori (Barcelone), en tournée à partir du printemps 2018.

Grace Ellen Barkey continue à développer son installation Magnolia. Elle en avait réalisé une première version pour le centre culturel de Strombeek, et pour l’inauguration du MILL en mars. Partant de vidéos sur les fleurs et d’un certain nombre d’objets, elle transforme un espace en un univers étrange où le spectateur peut explorer l’idée que l’humain est mortel et que la nature est éternelle.

PENDANT CE TEMPS-LÀ AU MILL
Marjolein a eu un bébé et Veerle Vaes a rejoint l’équipe pour assurer la diffusion des spectacles.

Le vendredi 22 septembre, les portes du MILL s’ouvrent toutes grandes pour CINEMAXIMIMILIAAN @ MILL'S HOME CINEMA EVENING. Cinemaximiliaan (un cinéma pop-up par et pour les primo-arrivants) y projettera une sélection de courts métrages.

Après l’entracte, c’est Goldfish Game qui est à l’affiche. Une occasion de revoir le premier long métrage de Jan Lauwers, qui a obtenu en 2004 au Slamdance Filmfestival (USA) le ‘Grand Jury Honor for Best Ensemble Cast’.

En septembre, Le poète aveugle de Jan Lauwers fera l’ouverture du festival de théâtre MESS à Zenica/Sarajevo. Ensuite, la même équipe mettra le cap sur Paris pour 2 semaines. Le poète aveugle sera à l’affiche du 11 au 22 octobre à La Colline. Qu’on se le dise.

Le festival de théâtre norvégien Fjaler accueille MaisonDahlBonnema le 15 septembre avec la one-big-song-performance The Moon, une production Needcompany.

FOREVER, l’émouvant spectacle de Lemm&Barkey sur l’adieu et sur Mahler passera au Monty le 5 octobre et au STUK les 7 et 8 novembre 2017.

Enfin, La chambre d’Isabella est de retour. Le classique de Jan Lauwers, qui a tourné dans le monde entier pendant 13 ans, revient à l’affiche, joué en version française par la De Muynck au Théatre National à Bruxelles les 9, 10 et 11 novembre. Tickets et petits pains chauds, tout ça. Vous êtes prévenus.

A partir du 20 octobre 2017 et pendant 6 mois, Ostende accueillera l’exposition ‘Het Vlot. Kunst is (niet) eenzaam’ des curateurs Jan Fabre et Joanna De Vos. Ils ont notamment choisi l’œuvre Glory Hole d’OHNO COOPERATION.

Pour terminer, des histoires d’étoiles et de stars:

Samedi dernier, une étoile a été scellée pour Viviane De Muynck sur le Walk of Fame d’Ostende (où figurent également Michel Piccoli, Jane Birkin et bien d’autres), et Viviane a reçu à cette occasion un Oustanding Achievement Award pour l’ensemble de sa carrière.

Romy Louise Lauwers a pour sa part obtenu le Sylvia Kristel Award pour son interprétation de Panda dans le long métrage ‘Het leven is vurrukkulluk’. Ce prix sera décerné pour la quatrième fois le 16 septembre lors du festival Film by the Sea à Vlissingen. D’après le jury, Romy est un jeune talent hors du commun qui, comme Sylvia Kristel, possède une personnalité exceptionnelle. « Elle sait allier la beauté à l’allure, la sagacité et la légèreté, et comme Sylvia, son travail fait fi des catégorisations.

Félicitations à toutes les deux!